Vendredi 11 mars 2067: Aurélien, nous partage son angoisse à l'arrivée à Vancouver
Avez-vous déjà connu la solitude immense qu’on peut ressentir quand on découvre un nouveau pays, une nouvelle culture? Ce vide qui oblige à aller chercher le sens du pourquoi on est là sur terre. Avez-vous des exemples d’étonnement à la découverte d’un pays? Par exemple au Brésil, il existe des concerts dans lesquels, c’est le groupe de musique qui tourne en bus autour d’un stade. Les spectateurs sur des estrades, peuvent voir les chanteurs de très près. Il est difficile de se projeter dans la façon dont vivent les autres pays sans y avoir été. Cela peut être déconcertant.

Plus beaucoup de nouvelles de Mathias depuis quelques semaines. Pas de nouvelles, bonnes nouvelles! Il semble prendre ses marques à Vancouver. 

Hier, je me suis remémoré le film de son arrivée. Voici quelques tuyaux pour les voyageurs en herbe de l'agora

Durant son voyage, Mathias semblait aux anges, le cargo voilier qui lui apportait quotidiennement son lot de découvertes, les repas de poisson, les amis qui l'accompagnaient, l'arrivée à Halifax puis ses quelques jours à Montréal à parler français. Enfin sa grande traversée du Canada en train. Tout semblait rouler pour lui. 

Et puis, la nuit de son arrivée à Vancouver, il nous a appelés aux aboies. Il a eu une crise d'angoisse. Ça m'a ramené quelques années en arrière quand il avait fait une crise d'angoisse suite à des problèmes à l'agora. J'aurais voulu être près de lui pour le prendre dans mes bras et lui dire que tout allait bien se passer.

Nous avons échangé au téléphone. Il m'a dit qu'il était au bout de sa vie. Je lui ai dit qu'il faudrait qu'il dise ça à Côme.  Il a ri et juste après s'est mis à pleurer et arguant que ce n'était pas rigolo et qu'il était triste que Papapi soit vieux. C'est simple quelque soi la phrase que je prononçais, il finissait toujours par pleurer.

Décalage horaire, voyage, nouvelles personnes, nouvelle langue, sans son entourage habituel, sans son petit coin à lui, l'arrivée à Vancouver s'est transformée en rite initiatique de passage au monde des adultes. Avec le voyage, il avait accumulé trop de fatigue et son corps était déréglé.

Il était épuisé, entré dans un cercle vicieux. L'excitation et l'intensité de tous ces changements cognitifs l'empêchait de trouver le sommeil. Il tournait en rond autour de tout ce qui était inconnu, de tous ses questionnements. Il arrivait inlassablement sur la même question : Qu'est-ce que je fais ici, je ne vais jamais tenir une année? Et il pleurait.

Les jours qui ont suivi, on s'est parlé au moins une fois par jour. C'est moi qui commençais à avoir des problèmes de sommeil. 9h de décalage ce n'est pas rien.

Il me disait. Les gens sont gentils mais je ressens un grand vide. Le matin, ça va bien et l'après-midi j’ai eu une montée de stress et d’anxiété. Il m’arrive de me réveiller la nuit et de pleurer sans comprendre ce qui se passe.

Je m’en veux de pleurer, de ne pas être bien. J'ai peur qu'ils me rejettent si je ne suis pas de bonne humeur. Je vous en veux de m’avoir dit que j’allais vivre une super expérience.

Apparemment quand Mathias est arrivé, la plupart des étudiants de l'agora de Vancouver étaient au ski. Il n'y avait que le père de la famille qui l'accueille. C'est un accointeur de l'agora de Vancouver. Il semblait très pris par les plus jeunes qui n'étaient pas parties skier. Je l'ai appelé. Son accent est compliqué. Il semblait débordé et en proie à un chagrin. Si j'ai bien compris, il venait de perdre un ami proche.

Au bout d'une semaine, ça allait mieux. Il a retrouvé les jeunes de son âge. Ils ont parlé neige et bateau. Mathias semble excité à l'idée d'aller faire du bateau.

Pour ceux qui partent en apatriage comme Mathias, voici quelques tuyaux  :

  • Se forcer à dormir pour ne pas faire de jetlag

  • Arriver en même temps que d'autres personnes

  • Avoir avec soi dans sa valise un peu de chez soi.

  • Prendre du temps pour soi à l'arrivée pour reconstituer un petit nid.

Je n'en reviens pas de réaliser que j'avais tout oublié de ma propre expérience…

Vos retours sont les bienvenus.

Jean-Christophe LEONARD

Crédit photo de Elijah O'Donnell

Jean-Christophe LÉONARD
11 mars, 2022
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